Mémoire1
Les fermiers Généraux ont eût l’honneur d’informer le Conseil par leur mémoire du 29. avril dernier2 que le Capitaine Tucker commandant la fregatte de Guerre le Boston s’était refusé à la Déclaration Et a la visitte, ils ont rapellé les Principes de les Reglements qui veuleur et ordonnent ces formalités.
Monsieur le Directeur Général a bienvoulu en Ecrire a Mr. Le Comte de Vergennes, en lui envoyant copie du proces verbal dressé au Sujet de ce refus de Visitte. Ce Ministre après d’être assuré que le Navire le Boston est une frégatte apartenante aux Etats unies et armée par les ordres du Congrès, a pensé que ce Vaisseau ne pouvoit être traitté comme un Bâtiment marchand, Et que les Employés de la ferme générale devoient se conduire à son Egard conformément aux Regles qu’ils suivent pour les Bâtiments de Guerre de toutes les autres Nations; c’est à dire qu’ils devoient s’abstenir d’en faire la visitte Et se borner aux précautions d’usage pour empêcher les Vaisseaux de Guerre de verser de la Contrebande dans nos Ports. C’est l’objet de la Lettre cyjointe Communiquée à la ferme Générale sous le No. 3905.3
Observations
Me Le Comte de Vergennes paroît penser que les Seuls Bâtiments marchands sont astreints a la formalité des Déclarations Et des Visittes, et que les Vaisseaux de Guerre en sont dispensés; ce seroit la matière d’un privilège formel loin qu’il en existe aucun, les ordonnances des fermes, les Réglements dont Elles ont été suivies et les différents ordres des Ministres y sont expressement contraires.
L’article 11 de celle de 1681. relatif au Commerce du Tabac porte
“Enjoignons aux maître de Navires, Barques et autres Vaisseaux de declarer au bureau dans les vingt quatre heures de leur arrivée, la quantité Et la qualité du Tabac dont ils sont chargés &ca.”
L’ordonnance de 1687. s’exprime aussi en fait de relâche article 9. du titre premier “Les Maîtres ou Capitaines des Vaisseaux seront tenus de faire leur Déclaration dans ces 24. heures après leur arrivée au plus prochain Bureau du lieu où ils auront elâché &ca.”
La même ordonnance porte article 5. du Titre 2.
“Ceux qui feront abordes des Vaisseaux, Batteaux ou Barques dans nos Ports de mer ou autres Lieux ou nos Bureaux sont Etablis, Seront aussi tenus sur les mêmes peines de donner dans les 24. heures après leur arrivée pareilles Déclarations des marchandises de leur chargement et de représenter leurs Connaissements.”
L’article 37. de la Déclaration du 1er. août 1721. confirme les dispositions de l’article 11. de l’ordonnance de 1681. cy dessus raporté; il ordonne qu’au moment de l’arrivée des Vaisseaux les Commis puissent aller àbord pour veiler et empêcher qu’il ne soit rien déchargé qu’après en avoir fait ou assuré la visitte; il enjoint au Capitaines et autres officiers de l’Equipage de donner aux Commis toute aide, faveur et protection Et d’empêcher qu’ils icy soient troublés.
Enfin les dispositions de l’arrêt du Conseil du 15. Septembre 1733. servant de Réglement pour les Tabacs de provision qui setrouvent sur les Bâtiments Etrangers, ne sont pas moins expresser, l’article 1er. porte “Les Commis et préposés du fermier pourront l’instant de l’arrivée de tout Navire Etranges de quelque Nation qu’il soit, setransporter àbord d’celui, à l’Effet d’éxiger la représentation des Tabacs de provision, et de prendre les mesures convenables pour qu’il n’en soit fait aucun Versement frauduleux.”
L’article 2. confirme la Loi de la Déclaration dans les 24 heures de l’arrivée des Navires, soit qu’ils viennent par destination, ou par relâche.
Toutes ces différentes dispositions des Réglement ne sont pas Seulement propres aux Bâtiments françois ou Etrangers, Marchands ou armés en guerre, Elles Sont communes aux Vaisseaux du Roi, l’article 566. du Bail des fermes de forceville dont les clauses sont les mêmes pour tous les Baux subséquents, s’exprime ainsi “les Commis Et gardes pourront aussi faire toutes Visittes dans nos Vaisseaux Et Galeres pour la Conservation de nos Droits; a quoi les Chefs d’Escadre Et les Intendants de la Marine tiendront la main.”
Il n’est pas sans example qu’en différents tems des Commandants des Vaisseaux du Roy ayent cru pouvoir se dispenser de remplir ces formalités, ou même s’y Soient refusés, mais il est sans example qu’ils y aïent été autorisés; au contraire les ordres particuliers de Ministres ont toujours maintenu dans ces circonstances l’observation des Règles Et l’exécution des Règlements.
En 1724. il fut armé un Vaisseau du Roy pour aller charger à Nantes des Bois de Construction; l’officier Commandant ce Bâtiment demanda d’être déchargé de faire sa Déclaration au bureau des fermes et d’y prendre les Expéditions ordinaires, cette demande ne fût point accordée. Elle fut jugée contraire a l’ordonnance de 1687 dont l’éxecution même à l’Egard des Vaisseaux du Roi fut regardée comme le Seul moyen de prévenir les abus. C’est-ce qui résulte d’une Lettre de Me. Le Controleur Général Monseigneur le Comte de Maurepas du 28 août de la même année 1724.
En 1764. il se présenta une autre difficulté des officiers des Vaisseaux du Roy refuserent de recevoir les Employés des fermes àbord de leurs Bâtiments; La ferme Générale addressa des représentations à Mr Le Duc de Choiseul Et lui demanda de nouveaux ordres tant au Sujet de la visitte des Employés àbord des Vaisseaux et autres Bâtiments du Roi lors de leur retour dans les Ports, qu’à l’Egard de la Déclaration qui doit être fournie au bureau des fermes.
Ce Ministre fit à la ferme Général l’honneur de lui marquer qu’il ne restait rien a prescrire sur les objets de son Mémoire, que toutes les instructions remises aux officiers Commandants des Vaisseaux et autres Bâtiments du Roi portoient Expressement qu’à leur retour, ils recevroient à leur bord les Employes des fermes, et empêcheroient qu’ils ne fussent troublés dans leurs fonctions. Ce Ministre ajouta que l’un des officiers Commandants qui par un mal Entendu avoit paru vouloir s’écarter de cette Règle avoit été d’esaprové de facon qu’iluy avoit pas lieu de craindre que son exemple fut suivi. La Lettre de Me. Le Duc de Choiseul à ce sujet est du 11. Août 1764.
En 1767. il fut fait sur des matelots au nombre de huit une saisie de vingt quatre parottes de Tabac qui avoient été déchargées du bord de la frégatte du Roi l’hirondelle alors dans le Port de Bayonne; le Commandant de ce Bâtiment reclama les matelots sur le pretexte du service ; ils lui furent rendus pour les gardes jusqu’au lendemain qu’ils devoient être conduits au Bureau pour y remplir les formalités résultantes de la Saisie Mais ils furent retenus àbord où on ne permit pas mème la Signiffication du procès verbal; à cette occasion le Directeur des fermes observa que les officiers des Vaisseaux du Roy qui fréquentoient le Port de Bayonne pour y prendre des Chargements de mâture et de Bois ne vouloient absolument souffrir aucune visitte des Employés des fermes soit àbord de leurs Bâtiments, soit même dans les Canots; La ferme Général rendit compte de ces faits; Mr Le Duc de Praslin blama la conduitte de l’officier Commandant, et donna les ordres les plus précis pour que les Commandants des Bâtiments du Roy permissent les visites des Employés des fermes, tant à leur bord, que dans les Canots et pour quils ne s’opposassent point a ce que les officiers, Mariniers, matelots et autres gens de mer qui se trouveroient Saisis de Tabac de Contrebande ou autres marchandises prohibées, fussent punisse suivant l’éxigence des cas.
Il est prouvé par le raport des ordonnances Et des Réglements que tous Navires Etrangers quels qu’ils soient sont assujettis aux formalités de Déclarations et des visites que les Vaisseaux même du Roi n’en sont pas dispensés, que Dans tous les tems et dans toute les circonstances le Gouvernement a maintenu même à leur Egard l’éxécution de la Loi. or si les Vaisseaux du Roy sont Assujettis à la Règle générale, a plus forte raison doit il en être de même des Vaisseaux Etrangers armés en guerre de quelque Nation qu’ils Soient. Jamais aucune puissance Etrangere alliée de la France, n’a été dispensée de ces formalités; il ne paroît pas qu’on puisse se prêtes aucune exception, Elle en Entraineroit d’autres dans les Suittes, et sufferoit seule en ce moment pour anéantir les prohibitions et ruiner les droits du Roy.
Les fermiers Généraux ont l’honneur de proposer ces observations comme très importantes pour la Régie qui leur est confiée. Ils supplient le Conseil de leur procurer une Décision qui en Soumettant au droit commune les Vaisseaux des Etats unis d’amérique, serve à fixer la conduitte qui doit être tenüe à leur Egard./.
[Translation]
Memorial1
The Farmers-General had the honor to inform the Council by their memorandum of the 29th April last2 that Captain Tucker, commanding the frigate “Boston,” had refused to make a declaration or allow an examination. They called to mind the principles and regulations that require and order these formalities. The Director General was good enough to write about it to Count de Vergennes, sending him a copy of the procès-verbal drawn up on the subject of this refusal to allow an examination. That Minister, after having assured himself that the ship “Boston” was a frigate belonging to the United States and armed by order of Congress, considered that it could not be treated like a merchant vessel, and that the officers of the Farm–General should behave in respect thereto in conformity with the rules they observe towards ships of war of all other nations; that is to say, that they should abstain from making an examination, and limit themselves to the usual precautions for preventing ships of war bringing contraband goods into our ports. This is the subject of the annexed letter communicated to the Farm–General under the number 3905.3
Observations
The Comte de Vergennes seems to think that merchant vessels only are subjected to the formality of declarations and examinations, and that ships of war are exempt therefrom; this would be a matter of formal privilege, and far from existing, the ordinances of the Farms, the regulations following thereon, and the various orders of the Ministers are expressly contrary thereto.
Article 11 of the Ordinance of 1681, relating to the tobacco trade runs thus:—
“Masters of ships, barques and other vessels are enjoined to report to the bureau, within twenty-four hours after their arrival, the quantity and quality of tobacco with which they are laden,” etc.
The ordinance of 1687 expresses itself thus regarding putting in port—Article 9 of the first title:—
“Masters or captains of vessels will be required to make, within twenty-four hours after their arrival, their declaration to the nearest bureau of the port where they put in,” etc.
The same ordinance contains as Article 5 of the 2nd title:—
“Those who, with vessels, boats or barques, put into our seaports or other places where our bureaus are established, will also be required, on the same penalties, to give, within twenty-four hours after their arrival, similar declarations of the nature of their cargoes, and to produce their bills of lading.”
Article 37 of the declaration of the 1st August 1721 confirms the provisions of Article 11 of the Ordinance of 1681 abovementioned; it orders that at the moment of the arrival of the vessels the employees may go on board to watch and prevent anything being taken ashore until after having made or ensured its examination; it enjoins captains and other officers of the crew to give the employee every help, favor and protection, and to prevent his being disturbed.
Finally, the provisions of the Decree of the Council of the 15th September 1733, serving as a regulation regarding the tobacco stores on board foreign vessels, are not less express. Article 1 states:—“The clerks and officers of the Farmer may, at the moment of the arrival of a foreign vessel of any nation whatsoever, go on board thereof for the purpose of demanding the production of the store of tobacco, and of taking proper measures so that no fraudulent landing be made.”
Article 2 confirms the law regarding the declaration within twenty-four hours after the arrival of the ships, whether the port be their destination or a stopping-place.
All these various provisions in the regulations are not only applicable to French or foreign vessels whether merchantmen or armed as ships of war; they are common to the King’s ships; article 566 of the lease of the farms of many towns, the clauses of which are the same for all subsequent leases, is expressed thus; “the clerks and custodians may also make any examination in our vessels and galleys for the preservation of our rights, in which the flag-officers and the intendants of the navy will lend their aid.”
It is not an unprecedented thing, that at various times commanders of the King’s vessels have thought they could dispense with carrying out these formalities and even refused to fulfill them, but there is no precedent for their being authorized to do so; on the contrary, special orders from the Ministers have always upheld in these circumstances the observance of the rules, and the fulfillment of the regulations.
In 1724, one of the King’s vessels was armed to go and take on board at Nantes some ship-building timber; the officer commanding this vessel asked to be excused from making a declaration at the Farms’ bureau, and from taking there the usual pass; this request was not granted; it was considered contrary to the ordinance of 1687, the observance of which, even with regard to the King’s vessels, was considered the only means of preventing abuses. This is evident from a letter from the Controller General to the Comte de Maurepas of the 28th August of the same year, 1724.
In 1764 another difficulty presented itself. Some officers of the King’s vessels refused to receive the employees of the Farms on board their vessels: the Farm-General made representations to the Duke de Choiseul, and requested from him fresh orders, both on the subject of examination by the employees on board the King’s vessels on their return to port, and with regard to the declaration that should be furnished to the Farms’ bureau.
That Minister did the Farm-General the honor to state that there was nothing to be prescribed on the subject of the representation; that all the instructions given to the commanding officers of the Kings’ vessels expressly stated that on their return they should receive on board the employees of the Farms, and prevent them from being disturbed in their duties. That Minister added that the conduct of one of the commanding officers who, through a misunderstanding, had appeared to wish to dispense with that rule, had been disapproved of in such a manner as to leave no reason to fear that his example would be followed. The Duke de Choiseul’s letter on this subject is dated 11th August 1764.
In 1767, there were taken from eight sailors twenty-four rolls of tobacco which had been landed from the Kings’ frigate “l’Hirondelle” then in the port of Bayonne; the commander of that vessel reclaimed the sailors on pretext of service; they were returned to him to be kept until the following day when they were to be taken to the bureau to fulfill the formalities resulting from the seizure. But they were kept on board, where the procès-verbal was not even allowed to be served. On this occasion the Director of the Farms observed that the officers of the King’s vessels frequenting the port of Bayonne to take in cargoes of masts and wood would not on any account allow any examination by the employees of the Farms, whether on board their vessels or in the boats; the Farm-General reported these facts; the Duke de Praslin blamed the conduct of the commanding officer, and gave most precise orders that the commanders of the King’s ships should allow the examination by the employees of the Farms, both on board and in the boats, and should not in the least oppose officers, watermen, sailors, and other sea-faring persons who might be seized with contraband tobacco or other prohibited merchandise being punished according as the case might require.
It is proved, by the testimony of ordinances and regulations, that all foreign vessels whatsoever are subject to the formalities of declaration and examination; that even the King’s vessels are not exempt therefrom, that at all times and in all circumstances the Government has upheld, even with regard to them, the execution of the law. Now, if the King’s vessels are subject to the general rule, there is all the more reason that the same should be the case with foreign armed vessels, of whatever nationality they may be. Never has any foreign power, allied to France, been exempt from these formalities; it does not appear that we can favor an exception; that would involve others later on, and would, at this moment, suffice only to annul the prohibitions and destroy the King’s rights.
The Farmers-General have the honor to submit these observations as being very important to the administration that is entrusted to them. They beg the Council to procure for them a decision, which, while subjecting to the common law the vessels of the United States of America, may serve to define the conduct that is to be observed with regard to them.